Sydney-Bangkok : Le rêve à portée d’ailes

C’est un doux parfum d’euphorie. Un bonheur intense, un zeste de fierté d’avoir été jusqu’au bout du rêve. De ne pas seulement l’avoir rêvé, de l’avoir caressé, assumé… Et au moment d’entamer cette dernière traversée qui doit nous mener de Pukhet vers Sriracha à une bonne heure de Bangkok, je pense à lui. L’homme, l’artiste, le voyageur, le poète, le marin, le pilote aussi, le fort en gueule. Celui qui vous « souhaite mille rêves et l’envie furieuse d’en réaliser quelques-uns »… Je pense à cet instant magique qui me guida dix ans plutôt à Hiva oa aux îles Marquises. Là où il dort pour l’éternité. Ce matin lorsqu’ un énorme « triple seven », un majestueux Boeing 777 de Thaï airline frôle nos ULM sur le tarmac, Brel est parmi nous.  Nous sommes à 363 nautiques de l’objectif. 672 petits kilomètres nous séparent « du bol de sangria » comme disent mes amis d’aventures. C’est peu et c’est beaucoup à la fois. Ce sera pour nous une très longue étape. Olivier Ronveaux nous prévient : La vigilance est de mise. Lors du Tour d’Afrique , une panne était intervenue à une demi heure de l’arrivée au Cap. Les prévisions de Luc Trullemans sont mauvaises. La mousson est déjà présente dans le Nord.  Jusqu’au bout, la vigilance sera de mise… Nous quittons l’aéroport international de Pukhet avec les encouragements des pompiers… Nos quatre ULM s’envolent et découvrent du ciel des paysages d’une rare beauté. Des milliers de pitons rocheux quittent les flots de la mer d’Andaman et tendent leur bras de pierre vers les nuages. Au pied de ces pics abruptes, des villages de pêcheurs, des plages du bout du monde, des eaux où l’azur, l’émeraude et le turquoise scintillent en bouquets de reflets. Un instantané rêvé de rêve éveillé. Ce vol est aussi bon que long. Les paupières sont lourdes mais la joie d’approcher du but très intense. Nous mettons le cap sur le Golfe de Thaïlande pour une dernière traversée maritime. Notre objectif est à portée de mains. Plus ce splendide 14-70mm de Sony Alpha qui m’échappe des doigts lors d’un ultime cliché osé pour vous offrir les photos les plus belles de notre belle aventure… J’en rage… L’objectif est à l’eau… Mais inexorablement le « bol de Sangria » se rapproche. Le rêve devient réalité… 108 kilomètres de mer plus loin, la terre est en vue. Les côtes, les gratte-ciel, et ce ciel bas que nous avons gratté mille et une fois de nos ailes intrépides. La piste de l’aérodrome de Sriricha est en vue. Ultime approche, ultime atterrissage de cette première partie de périple. C’est ici que durant Cinq mois nos ULM reposeront avant de repartir par les airs vers la Belgique. Cette Belgique sans laquelle notre pari fou aurait sans doute échoué. C’est dans le décor cosy et typique de la résidence de l’ambassadeur belge à Bangkok que nous célébrons notre réussite. Comme le fit Paul Lambert lors de notre passage à l’ambassade belge à Jakarta, Son excellence, Rudy Verstraeten et son épouse, le premier diplomate Michaël Wimmer, le consul, madame Anna Hajdu, nous félicitent pour cette noble et folle aventure qui porte haut les couleurs du drapeau national au-delà des frontières. Sans le plein appui du gouvernement, l’implication des ministres fédéraux des affaires étrangères, de la mobilité et de la politique scientifique, l’aventure eût frôlé le fiasco. Mais à chaque-fois que le stress montait, « Bruxelles » (Comprenez la voix de Monsieur Michel Top, conseiller du vice-premier ministre Karel De Gucht) était là au bout du fil pour tenter de débloquer la situation… Nous sommes donc à Bangkok. Sa chaleur son fleuve, le réconfort d’y avoir bouclé un périple de quatorze mille kilomètres en ULM.   Ce soir la brise nous souffle un doux parfum d’euphorie, un bonheur intense, un zeste de fierté d’avoir été jusqu’au bout de notre rêve. D’ici, de là, et comme lui, je vous souhaite « mille rêves et l’envie furieuse d’en réaliser quelques-uns »…