Leh : Le petit Tibet

Son nom signifie « la demeure des neiges » ; l’Himalaya : Puissant comme le roc, grandiose comme l’Everest qui culmine au loin. Massif de montagnes qui  s’étendent  sur  plus de 2400 kilomètres de long et 250 à 400 kilomètres de large. Du pays d’en haut, l’immensité de ses sommets, l’immaculée blancheur de ses flancs et les nuages d’ouate perdus dans cet océan céleste. Quatorze de ces pics indomptables culminent à plus de 8000 mètres. C’est là, quelque part au milieu de nulle-part, que nous allons découvrir l’un des plus beaux endroits du globe : Le Ladakh et ses villages clairsemés dans la rude immensité des vallées escarpées. Le Ladakh et l’indus, une des sept rivières sacrées de l’Inde. Le Ladakh et « ses enfants » : Les Ladakhis, fiers et forts, perpétuent un mode de vie ancestral aux confins de l’Inde.  Quelques cultures de haute altitude, des ânes pour creuser les sillons et porter les récoltes, des vaches tibétaines croisées avec des Yaks dont on récupère les excréments pour se chauffer. Dans la ville de Leh, coincée entre le cachemire pakistanais et la Chine, on vit comme personne au rythme des saisons. Car ici les saisons sont impitoyables : A la douceur de l’été répond la rudesse de l’hiver. Celle que nous allons affronter en passant la nuit chez l’habitant. Loubzna nous accueille avec ferveur dans sa petite maison faite de briques de boue séchée. Quelques pièces sombres et non chauffées, peu d’électricité, un WC en terre battue avec pour cuvette un simple trou et dans ce logis du bout du monde, une ferveur et une chaleur humaine inégalée. Nous arrivons en « amis » grâce à Roland Ghigny. Mon ami Roland, voyageur au long cours et qui a laissé une part de lui-même dans cette région qu’on appelle « le petit Tibet ». Roland y parraine Santzin, une jeune fille qui réside dans un internat financé en partie par des belges. Ce sera  notre première halte. De 32 degrés à Jaipur, le thermomètre descend désormais à dix degrés sous zéro en journée. Moins 20 la nuit, jusqu’à moins  40 au mois de janvier… Conditions de vie spartiates pour ces enfants attachants : Un puits pour récupérer l’eau, des panneaux solaires pour se réchauffer et quelque peu s’éclairer, aucune réelle commodité… De petites chambres aux lits superposés… Et des écoliers studieux, tirés à quatre épingles dans leur uniforme bordeaux. Bordeaux comme l’est la couleur des vêtements traditionnels des moines boudhistes. Ils vivent reculés dans des monastères perchés sur des collines. Celui de Thiksay notamment ; construit il y a 600 ans sur la rive droite de l’indus. De petits moines de sept ans à peine y côtoient leurs aînés dans la ferveur de la foi. Ils appartiennent à l’ordre des Gelugpa : « Les vertueux ».Soudain, une étrange musique résonne dans la vallée à quatre mille mètres d’altitude : haut-bois et tambours rythment les prières. Dans une pièce richement colorée et dédiée à Boudha, les moines  récitent leurs prières en se balançant. Chaque prière est ponctuée par une salve de clochette activée par le moine supérieur… Atmosphère irréelle. Instant magique dans ce « petit Tibet » où réside deux semaines par an le Dalaï Lama. Sur ces terres lointaines, on perçoit déjà les effets  du réchauffement. Les glaciers de l’Himalaya fondent, les températures hivernales augmentent. Lapka, notre guide nous l’explique : « Autrefois, dans les gorges du Zanskar,  les eaux du fleuve Tchadar étaient gelées plusieurs mois par an. Depuis quinze à vingt ans, cette période de gel diminue fortement. Cela empêche les ladakhis vivant au loin d’emprunter le fleuve gelé et de rejoindre facilement la ville de Leh ». D’années en années dans ce gigantesque Ladakh,  la demeure des neiges se déleste peu à peu de son profond manteau blanc…