Le grand départ

 C’était il y a six mois. Brel était parmi nous. Nous réalisions notre rêve : Relier Sydney à Bangkok en ULM. En quête de grands espaces, de liberté, d’humanité aux confins du monde. En quête de compréhension aussi : Est-il vrai que la planète court à sa perte ? Qu’elle est malmenée comme jamais par les comportements de l’homme moderne. Les images, les rencontres, ont forgé en nous cette conviction. Oui il est temps d’agir pour faire évoluer les mentalités. Convaincre plutôt que blâmer. Comment oublier ces images de la grande barrière de corail en péril, cette île de Sumatra défigurée par le déboisement effréné des industriels, ces lagons d’une rare beauté où tant d’espèces de poissons sont menacés de disparition… Comment oublier la chaleur de ces alter-ego du bout du monde, ces sourires d’enfant, la sueur des forçats du Kawah Ijen, ces moments de doutes, de fatigue extrême, de bonheur pur quand après 14 mille kilomètres d’efforts, nous réussissions la première partie du défi. La meilleure façon de marcher dit-on , c’est de mettre un pied devant l’autre et de recommencer… La meilleure façon de rêver, c’est sûrement de ne pas laisser ses idéaux au bord du chemin. Alors nous voici ; de retour ; pour nous ; pour vous. Bienvenue à Bangkok. Six des sept pilotes de l’escadrille sont sur pied de guerre. Sur la base militaire de U Tapao. Cette base qui accueillait les bombardiers 52 américains durant la guerre du Vietnam. C’est ici, dans une chaleur étouffante  qu’Olivier Stul,  Olivier Ronveaux, Jean Penninckx et Pierre Hallet mettent une dernière-fois les mains dans le camboui. Entretenir les ULM, les équiper de réservoirs supplémentaires qui nous permettront d’allonger les distances de vol en cas de besoin. Nos moustiques du ciel côtoient de vieux Cessna de la Thaï Navy qui servaient aussi au Vietnam. De vieilles carcasses rouillées, des cockpits pillés qui témoignent de ce passé belliqueux. Et à quelques encablûres de nos trousses à outils, le vrombissement de gros porteurs qui prennent leur envol sur cette gigantesque base. Notre envol c’est dans quelques heures que nous le prendrons. Il est minuit dans la moiteur de la nuit thaïlandaise. La nuit sera courte. Jean-Claude et moi avons couru aux quatre coins de Bangkok pour rencontrer les représentants du WWF, ceux d’Oxfam, Thierry Falise également ; fin connaisseur de la Birmanie qui nous accueillera demain. Une journée  difficile au cours de laquelle les soutiens de l’ambassade nous auront été précieux. Celui de l’ambassadeur Veestraete qui la veille au soir nous accueillait dans sa splendide résidence coloniale, plantée au beau milieu des gratte-ciel de la ville,  pour une conférence de presse officielle devant la presse thailandaise. Celui de Michaël Wimmer, le premier secrétaire de l’ambassade, celui d’Eddy Suis officier de liaison de la police belge sur place, celui de sa charmante, une vieille et belle connaissance : Christelle Hostens qui fut ma collègue à RTL.  Last but not least, celui de toute l’ambassade belge à New Dehli qui quelques jours à peine avant notre survol de l’Inde nous annonce la bonne nouvelle. Nous avons obtenu l’autorisation diplomatique pour survoler le pays. Madame De Bock, madame Jamart, Monsieur Boogaerts… A tous merci pour votre soutien efficace.   Avant de s’envoler, nous pensons à vous que nous aimons. Vous qui nous aimez. Nos proches, nos enfants,  nos amis, tous ceux qui nous encouragent à distance et sans qui le rêve n’eut été qu’illusion. Le plus dur reste à faire mais nous sommes prêts. Demain donc, nous survolerons le pont de la rivière Kwaï, l’irrawady et son delta, nous nous envolerons vers l’un des pays les plus fermés du monde et paraît-il l’un des plus beau. Le Myanmar. Dès que possible nous vous écrirons, pour partager le rêve. Comme il y a six mois. Avec le grand jacques dans un petit coin de notre mémoire…  

 

Bons baisers de Bangkok.